Interview du Dr. Adrien Vidart

C’est avec un grand plaisir que nous avons interviewé le Dr. Adrien Vidart, chirurgien urologue à l’hôpital Foch, à Paris.
Il a déjà implanté de nombreuses fois nos prothèses hydrauliques. Il nous parle de son expérience, de ses techniques, et répond bien sûr à vos questions.

Retrouver le replay de l’interview ici !

Pouvez-vous présenter l’hôpital où vous travaillez à Suresnes ?

Je travaille à l’hôpital Foch depuis 10 ans. C’est un établissement très dynamique qui a la particularité d’être une structure privée adossée à une fondation qui nous aide dans nos axes de recherche, mais nous participons au service public. Donc à ce titre, la grande majorité de toutes les activités qui sont faites à l’hôpital Foch sont faites de façon publique, comme si on allait dans un hôpital public, par rapport aux coûts indus pour les patients ou leur prise en charge vis-à-vis de leur mutuelle.

J’ai une double étiquette. Je suis à la base gynécologue, et quelques mois avant de finir mon internat, j’ai été recruté par les urologues pour mon intérêt pour la chirurgie fonctionnelle. J’ai refait ensuite tout un cursus complet d’urologie. Puis il y a 10 ans à Foch, il m’a été donné la possibilité de participer à l’ouverture d’une unité sur la prise en charge de chirurgies fonctionnelles (incontinences urinaires hommes/femmes), et il y avait déjà une activité de chirurgies transgenres dont je n’avais pas la charge. Le chef de service m’a demandé d’y participer.

Je suis impliqué à des moments spécifiques de la prise en charge des patients, notamment sur la prise en charge de l’implantation des matériels prothétiques. J’avais pas mal d’expérience dans l’implantation des prothèses urinaires, notamment les sphincters artificiels, qui ont pas mal de similitudes avec les prothèses péniennes et les prothèses hydrauliques, donc il a semblé assez naturel que je me dédie à cela. Je l’ai fait au début par curiosité, et progressivement je me suis attaché à la population concernée et aux possibilités thérapeutiques qui leur étaient proposées.

Vous intervenez au moment de la création de la phalloplastie ?

Initialement à Foch, il y avait un partenariat avec un chirurgien plasticien qui est toujours là et qui est Marc Serra. Marc est très présent et continue encore beaucoup à s’occuper de la phalloplastie. Ça change cette année avec l’arrivée de François-Xavier Madec, qui va agrandir l’équipe et développer des pôles d’activité qu’on n’avait pas le temps de développer. Jusqu’ici, Marc voyait les patients qui nous étaient adressés après une évaluation par nos collègues psychiatres. Marc continue à gérer toutes les parties physiques et esthétiques à prendre en charge. Il gère les étapes de la phalloplastie et du scrotum. On a décidé de mettre en place tout ce qui était nécessaire pour pouvoir implanter facilement la prothèse pénienne. J’interviens pour la mise en place de la prothèse pénienne. Je rends fonctionnel quelque chose qui a été créé, ou une chirurgie qui a été faite.

Quelles sont les techniques de phalloplastie que vous utilisez ?

On est restés sur des techniques qui nous apportent beaucoup de confort. Nous n’avons pas développé les techniques de lambeaux libres, 2 raisons à cela : une disponibilité de l’équipe, notamment des plasticiens, c’est une chirurgie qui nécessite un investissement important, avec des risques de complications (thromboses etc.) donc on ne peut pas le faire et laisser les autres gérer, donc les lambeaux libres n’ont pas été mis en place tout de suite. De plus je trouve les lambeaux antébrachiaux inesthétiques. Donc avec Marc, on est restés sur des lambeaux inguinaux ou abdominaux et non pas des lambeaux libres, mais cela va changer avec l’arrivée de François-Xavier, qui est très dynamique. Il a organisé des réseaux pour que des plasticiens (notamment d’une équipe universitaire avec le Pr Yvelin) puissent venir et participer à un réseau qui nous permettra d’offrir la possibilité au patient d’avoir des phalloplasties avec des lambeaux. C’est vraiment l’un des objectifs. Moi aussi, j’étais exclusivement sur de la chirurgie FTM, on sent qu’il y a une demande pour des prises en charge MTF et gérer les vaginoplasties donc François-Xavier, qui a l’expérience, va développer l’activité bientôt. Nous travaillerons ensemble parce que c’est très souvent des travaux d’équipe.

Si vous ne pratiquez pas l’antébrachiale, vous ne pratiquez pas non plus de microchirurgies de nerfs afin qu’il y ait des sensations ?

C’était justement une des grandes questions, un des axes de travail d’où l’arrivée de François-Xavier Madec, et puis de la mise en place d’un partenariat avec les services de chirurgie plastique pour avoir une offre beaucoup plus vaste et plus de disponibilités. Il vaut mieux rester sur des techniques qui donnent un taux de satisfaction plus élevé. Ensuite, plus on se développera, plus on aura d’options.

Il n’y a donc plus de sensations ?

Si, il y a toujours une sensation clitoridienne avec l’enfouissement du clitoris qu’on conserve de toute façon, ainsi qu’une sensation cutanée. La satisfaction sexuelle est variable, on l’évalue à travers des questionnaires qu’on envoie après l’implantation de prothèses. La sexualité du couple ne se résume pas toujours à une pénétration. La sexualité a des multiples facettes, et ne se résume pas qu’à une perception de sensations.

Au niveau des sensations, un clitoris a environ 8000 récepteurs localisés, et environ 4000 pour un gland. Un clitoris sera donc toujours plus sensible qu’un gland. On aimerait bien pouvoir transposer l’un à l’autre avec une longueur acceptable. Pourtant anatomiquement parlant, on a encore des difficultés à le faire. Mais les techniques chirurgicales évoluent et je suis persuadé que mes collègues plus jeunes bénéficieront de ce qu’ont fait les ainés pour faire mieux.

C’est important de discuter avec le patient pour savoir ce qu’il veut. Est-ce qu’il veut des sensations ? Quelque chose de long, étoffé et efficace ? Est-ce qu’il veut des voies urinaires ? C’est compliqué de tout obtenir dans sa totalité. C’est pourquoi il est nécessaire de définir ce qui va être important pour le patient, d’établir une sorte de cahier des charges. On reste dans une chirurgie qui est très sur mesure.

Comment se préparent les lambeaux ?

Nous pouvons utiliser des ballons d’expansion au niveau abdominal. Mais au niveau esthétique sur la phalloplastie, cela pouvait donner une cicatrice dorsale que je ne trouve pas très esthétique. Donc c’est vrai que je préfère les lambeaux inguinaux, qui en plus, donnent la possibilité d’avoir une 2ème tentative. Il nous est arrivé d’avoir des problèmes de nécrose, d’infections… Sur le lambeau inguinal, on a une cicatrice qui est ventrale, et qui est plus anatomique et qu’on retrouve chez des verges biologiques, donc je trouve cela beaucoup plus esthétiquement acceptable. En plus, cela nous permet d’avoir 2 qualités. En tant qu’implanteur de prothèses, j’aime bien avoir du tissu, de la graisse, avoir qch d’étoffé et d’assez dense. Plus j’ai de tissus, mieux c’est. Et surtout la longueur de la phalloplastie inguinale fait que si au pire on a de la nécrose, on a de la longueur pour pouvoir gérer et encore pouvoir implanter une prothèse d’une taille qui va satisfaire le patient, plutôt que d’être limité en cas de risque de nécrose, de perdre de la longueur, ce qui est toujours très gênant pour les implantations ultérieures de prothèses.

Qui s’occupe de la mise en place des prothèses ?

Marc Serra et moi-même. Pour la prothèse testiculaire, c’est souvent lui qui les implante. Il est essentiel, c’est lui qui va préparer tout le terrain pour pouvoir implanter la prothèse pénienne avec le moins de difficultés possibles. On s’aperçoit que si les prothèses testiculaires sont en place, c’est comme s’il y avait une « coque », un « nid » qui se créait, et qui est une réaction naturelle de notre organe, des tissus, à chaque fois qu’on implante du matériel prothétique. Mais quand cette « loge » s’est créée autour de la prothèse testiculaire, quand on implante la pénienne et quand on enlève la prothèse testiculaire, on a une loge déjà faite, un emplacement, et qui a surtout une certaine solidité, et dans lequel on va pouvoir mettre la pompe qui va faire fonctionner la prothèse pénienne. Cette rigidité est importante car elle limite énormément le risque d’érosion. Donc plutôt que de considérer que la prothèse testiculaire était la dernière étape, il valait mieux le faire avant l’implantation.

Donc concrètement, vous créez le scrotum, et au moment de la scrotoplastie, vous insérez les implants ?

Oui, si on a suffisamment de place, on insère les prothèses testiculaires à ce moment-là. Si on n’a pas assez de place, on met des petites tailles. On n’hésite pas à revoir et à faire un temps intermédiaire où on va mettre des prothèses plus grosses. On se pose la question de mettre des prothèses expansibles, mais on n’a pas encore trouvé le modèle qui nous allait sur des prothèses de petites tailles gonflables.  L’idée est justement d’avoir quelque chose de plus spacieux, large, et qui va s’adapter à la pompe de la prothèse pénienne.

Que pensez-vous des implants malléables et hydrauliques ?

J’en ai déjà implanté mais la malléable n’a pas ma faveur. La phalloplastie est déjà un peu fragile au niveau vasculaire, alors avec la mise en place de quelque chose de rigide on risque de créer des points de compression permanents sur des mêmes zones, ce qui peut amener à des nécroses. Par ailleurs, les implants hydrauliques apportent une physiologie qui se rapproche de ce que l’on connait habituellement et qui me semble beaucoup plus acceptable.

Comment mesurer la taille de l’implant par rapport à la phalloplastie ?

Il faut avoir conscience que la prothèse va se fixer sur l’os pubien, qui est beaucoup plus profond sous la peau. La majorité des gens mesurent la partie extérieure de la verge. Mais nous allons mesurer quelque chose de beaucoup plus profond et qui va dépendre notamment de la morphologie du patient. Donc on va être amenés à mettre des longueurs de prothèses différentes pour s’adapter à la morphologie du patient. Ce n’est pas la prothèse qui va donner la longueur de la phalloplastie, mais au contraire elle va s’y adapter.

Qu’en est-il des chirurgies de vaginoplasties ?

C’est une activité qui s’ouvre cette année avec l’arrivée du Dr Madec, donc le temps d’attente est assez court. Il y a un secrétariat dédié, un circuit de soins dédiés, une prise en charge etc. Il y a une vraie volonté de la part de l’établissement d’être présent.

Faites-vous des prolongements de l’urètre ?

Oui, mais pas systématiquement. Les taux de complications qui ne sont pas neutres. Les risques de sténose obligent le patient à avoir des dilatations régulières, et les risques de fuite qui dans la vie de tous les jours donnent des moments extrêmement inconfortables. Ces deux problématiques donnent des gestions des complications au quotidien qui sont vraiment invalidantes.

On a remarqué sur nos lambeaux que souvent on avait des risques de nécroses ou de complications liées aux voies urinaires qui nous faisaient perdre de la longueur sur la phalloplastie. C’est aussi un des axes qui nous pousse à développer les lambeaux pour avoir plus de matériel. Je reste convaincu qu’on n’a pas encore le bon tissu à notre disposition pour pouvoir reconstruire l’urètre. On commence à avoir des produits dans d’autres types de chirurgie urologique qui nous permettent de reconstruire un peu de longueur urétrale. Malheureusement l’urètre chez l’homme est très long (15-20cm).

Ce sont de vraies questions que l’on a avec le patient. On peut vous donner une phalloplastie qui va être visuellement satisfaisante, qui va vous permettre d’avoir une sexualité active. Si vous faites le choix personnel d’aller vers les voies urinaires, c’est possible mais attention car on va multiplier les risques. Avec Marc, nous avions mis le frein sur les voies urinaires peut être car nous n’étions pas assez, mais l’arrivée de François-Xavier va nous aider à nous remettre en question sur ce sujet-là.

On sent qu’il y a une vraie volonté internationale de faire mieux. Il s’agit d’un choix stratégique de la part du patient.

Si l’urètre est sur le côté, est-ce que cela pose un problème pour implanter la prothèse ?

Non, car il s’agit d’un monocylindre plus adapté à la phalloplastie. Tout dépend du trajet de l’urètre au sein de la phalloplastie, mais si la sortie de l’urètre est latérale ou ventrale, c’est techniquement possible.

Vous recevez des patients qui viennent d’autres villes ?

Oui, tout à fait. Je peux toujours donner un avis, ce n’est pas un problème. Après tout dépend de ce qui a été fait ailleurs. Tout se gère au cas par cas. Il est totalement légitime de pouvoir demander un avis dans une autre équipe. Établir une relation de confiance sur des parcours de santé qui sont longs, c’est important.

Des patients étrangers aussi ?

Ça m’est arrivé. Essentiellement des patients européens. Sur la prise en charge à Foch il existe un département international, dédié à la prise en charge des patients internationaux. Ce peut être pour une consultation, ou pour une prise en charge chirurgicale. On a aussi des traducteurs officiels qui sont présents, tout est organisé.

ZSI est le seul fabricant européen de sphincter urinaire artificiel, d’implants péniens malléables et hydrauliques comme solutions à des problématiques urologiques masculines (incontinence), sexuelles (dysfonction érectile), et des procédures de réassignation de genre (prothèses pour personnes transgenres).

 

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